ETHERVAL 2 : LA PEINTURE
« UT PICTURA, ARS MAGICA »
L’Art de la magie est comme la Peinture
Revue sortie depuis le 22 février 2013
À travers ce numéro, nous vous invitons à découvrir toute une série de nouvelles de Fantasy et de Fantastique, voire même pour la toute première fois une nouvelle d’Horreur.
Ne vous effrayez pas d’arriver en plein combat mortel, alors qu’un maître peintre aide son camp de ses créatures de pigments ! (« Dans l’Abîme » de Galmier Falconis)
Laissez-vous emporter par cette autre bataille, celle solitaire, que se livrent deux êtres que tout oppose, désireux de soulager le monde de ses maux. (« Nuances » de Jérôme Simon)
Porté par des courants plus légers, laissez-vous bercer par les vagues, suivez l’envol gracieux d’une raie des vents depuis la fenêtre d’un monastère perdu en pleine mer, en attendant le jour de la désignation du meilleur apprenti en magie picturale. (« Les Toiles du Firmament» de Yann Valère)
Si vous préférez une atmosphère plus rock and roll et cowboy, pourquoi ne pas vous arrêter dans la charmante petite bourgade américaine de Santa Luna ? À peine une vingtaine de personnes y ont péri hier suite à la création d’une nouvelle œuvre d’art. Bref, une journée assez calme. (« Santa Luna » de Rémi Przybylski, désormais un grand habitué d’Etherval avec sa troisième et impressionnante sélection !)
Vous hésitez ensuite à vous asseoir pour discuter avec cet honorable monsieur dans cette maison isolée à l’ameublement surchargé et dont les murs sont couverts de toile à la sanguine ? Un a priori embrume votre esprit, comme celui de ce policier décidé à retrouver une fillette disparue récemment dans le quartier ? Voyons, qu’allez-vous donc imaginer ? (« BlackVille » de Mike Barisan)
Après tant d’émotions, vous ressentez le besoin de vous poser un moment ? Pourquoi ne pas vous asseoir sur cette margelle au musée, à contempler cette femme superbe sur cette toile de maître ? Un jeune garçon non loin de vous paraît pris d’émotion suite à la même contemplation ? Nous sommes désolés, mais le musée ferme ses portes ! Il faudra vous faufiler dans l’ombre susurrante si vous désirez rester à ses côtés. (« États d’Âme » d’Andréa Deslacs)
En version audio et numérique, découvrez aussi le coup de cœur de la rédaction à travers un texte inédit de SF ! Car le monde a manqué de sombrer. Heureusement l’Ordre de l’Echiquier est venu guider les derniers humains survivants et les encadrent de sa foi pour leur éviter de sombrer de nouveau dans le chaos. La couleur, par les émotions qu’elle inspire et le trouble qu’elle suscite, est un fléau moral. De quoi corrompre n’importe quelle âme ! Même celle d’un jeune garçon à la poursuite d’un rat ?
En plus de ses nouvelles, Etherval vous propose toujours ses articles et ses pages de détente.
Santa Luna, de Rémi Przybylski
Eddy était méchant. Il marchait au beau milieu de la route comme si les rues lui appartenaient, et regardait les gens de haut avec son air de rockeur américain tout droit issu du Texas. Perché sur de fines et ridicules jambes arquées, son buste était digne d’un haltérophile endurci. Sur celui-ci était posée une petite tête dissimulée sous une immense moustache. Il avait arrêté de fumer il y a quelques mois, mais il empestait encore le tabac froid à des kilomètres. Quand son médecin lui avait annoncé que ses poumons n’étaient pas jolis-jolis, il s’était dit qu’il devait se prendre en main. Il avait alors décidé que c’en était fini d’avoir la clope au bec. Comme rien n’était jamais facile dans sa vie, il avait compesé en se mettant à boire.
Santa Luna est une charmante petite ville au beau milieu du désert où fleurissent malfrats et criminels notoires. On y trouve peu de sites touristes, mais sûrement l’un des bars les plus fréquentés que la planète ne connaîtra jamais. Chez Ramires, la règle d’or n’est pas de boire plus qu’il n’en faut, mais de boire bien plus encore. L’immoralité de cet adage est d’ailleurs régulièrement vérifiée par la plupart des Santa Luniens, accrocs aux commérages sur les crimes quotidiens. Jusque là, si personne ne faisait plus attention à ces cruelles banalités, l’apparition d’un nouveau mal bouleverse peu à peu les habitudes de la petite bourgade…
Nuances, de Jérôme Simon
Il ignorait presque tout de cet être voleur. Il connaissait son existence par son maître qui lui avait transmis sa fonction et son pouvoir au moment de son dernier souffle, lorsque toute teinte l’avait quitté, quand le Blanc Éternel l’avait étreint et emporté sa forme. Il savait simplement que tout comme lui, il avait également hérité de sa charge par celui qui l’avait instruit. Ils s’opposaient, peintres et chromatistes, depuis des temps immémoriaux, ceux qui prenaient la couleur et ceux qui la donnaient, ceux qui absorbaient la vie et ceux qui l’insufflaient. Ils dansaient autour des mêmes lieux, autour des mêmes arbres, foulaient la même terre et observaient les mêmes paysages. Leur office, lui, était toutefois bien différent.
— Tu es vert de rage.
— Tu vois la vie en rose.
— Tout me paraît gris…
Les couleurs et les émotions s’entremêlent. Celui qui les dispense et celui qui les reprend se cherchent. Au final, il n’y a rien d’absolu en ce monde, tout est nuances…
Etats d’âme, d’Andréa Deslacs
J’arrive au pied de l’escalier extérieur du musée, monumentale construction au toit triangulaire et à la façade sculptée. Je grimpe, quatre par quatre, les marches du perron et, lors que survient mon tour, j’achète un ticket auprès de la souriante guichetière elfe blanche. Elle me connaît désormais bien pour m’avoir vu venir tous les jours. Mon billet en main, je file sous les hautes voûtes, négligeant toutes les beautés qui s’étalent autour de moi. Ici, je ne peux pas courir, alors je piétine d’impatience quand on m’obstrue le passage. Nombreux ont été ceux à vouloir assister à cette exceptionnelle ouverture tardive afin de découvrir le clou de l’exposition au second étage. Par chance, je ne grimpe qu’au premier. Enfin, j’arrive devant elle.
Elle.
Elle est belle, non ?
Quand la contemplation d’une peinture vous prend aux tripes, que l’émotion vous submerge à chaque fois, qu’au-delà d’un bout de tissu couvert de pigments vous ne voyez qu’une femme magnifique, une femme que vous désirerez tant frôler du bout de vos doigts et qu’en réponse à votre amour, elle vous enserre avec force ! Alors, pour cette toile, pour ce modèle, que ne seriez-vous pas prêt commettre, sans le moindre état d’âme, afin de la posséder ?
L’Hérésie chromatique, de Tarik Kellou
(Une exclusivité numérique et audio, envoyée par courriel à tous les lecteurs de la revue papier !)
— Monsieur Abendsen, est-il vrai que les hommes de l’ancien monde portaient parfois de la couleur ?
La question souleva les énormes sourcils d’Abendsen. Le sujet n’était pas interdit à proprement parler, mais il restait toutefois inconvenant de l’évoquer.[…]
— Voilà qui est intéressant. C’est tout à fait exact, Cléon. L’étendue de ta culture ne cesse pas de m’étonner. Vois-tu, l’ancien monde débordait de couleur. Il n’y avait que cela, partout où se posait le regard ! Les hommes les étalaient sur tous les murs et même sur les corps ! […]Ils les projetaient sur le ciel. Les déchets, que leurs villes surpeuplées vomissaient dans les océans, en regorgeaient aussi. Les teintes les plus contre-nature recouvraient la moindre surface pour tenter de capter l’attention, fatiguant l’œil et l’âme de l’homme jusqu’à ce qu’il en soit aveuglé — ici Abendsen leva une main solennelle — incapable de reconnaître le bien et le mal.
Le monde a manqué de sombrer. Heureusement l’Ordre de l’Echiquier est venu guider les derniers humains survivants et les encadre de sa foi pour leur éviter de sombrer de nouveau dans le chaos. La couleur, par les émotions qu’elle inspire et le trouble qu’elle suscite, est un fléau moral; De quoi corrompre n’importe quelle âme ! Même celle d’un jeune garçon à la poursuite d’un rat ?
Blackville, de Mike Barisan
En tout cas, l’officier se sentait rebuter au plus haut point par les nombreuses peintures du salon. Cette touche décorative totalement abjecte plongeait la pièce dans une étreinte d’angoisse permanente. Les peintures ressemblaient à ces photos sépia que l’on trouvait parfois dans les albums, sauf que dans le cas présent, leur teinte virait au rouge. Ajoutées à la pénombre, à l’abondance de bois et au silence seulement brisé par les craquements des fagots, les rafales de la pluie et les tic-tac distants des aiguilles de l’horloge, de telles œuvres ne faisaient qu’accentuer son malaise. Ou alors était-ce dû à tous ses yeux inquisiteurs ? Car il s’agissait de portraits. Des visages mélancoliques qui se contentaient de vous observer fixement, silencieusement, comme leur propriétaire.
— Vous aimez la peinture, inspecteur ? s’enquit Monsieur Hill, debout face à lui.
Nik ne vit plus que pour retrouver pour son métier, vu que sa vie personnelle n’a plus de sens. Chargé d’enquêter sur une disparition d’enfant, il passe la porte d’un manoir où les peintures murales le frappent et font remonter en surface de bien sombres souvenirs.
Dans l’abîme, de Galmier Falconis
Rodrick peint sur une colline, protégé par plusieurs rangs de lanciers. Le fracas de la bataille ne semble pas le troubler et il choisit ses couleurs avec soin. En contrebas, les deux armées s’affrontent dans la poussière et le chaos, soldats impériaux et mercenaires du sud unis dans une danse sanglante. De chaque camp jaillissent des traits qui harassent l’arrière de l’infanterie ennemie. Les cavaleries tournent autour du combat, fauves virevoltants attirés par leur proie. Se cherchent, se jaugent, s’évitent pour mieux se détruire.
Trente ans plus tôt, un peintre découvrait une formule permettant d’animer ses tableaux. Avec cette technique, il mit ses capacités au service de son roi.
Aujourd’hui, Rodrick, son disciple, peint au cœur des batailles et donne vie à des œuvres évanescentes et meurtrières. Des œuvres qui ont transformé le royaume qu’a connu son maître en un puissant empire, invaincu, inégalé.
Et si un jour cet avantage disparaissait ?
Les Toiles du Firmament, de Yann Valère
Au loin, voguant parmi les nuages, j’aperçois une caravane de goélettes tractées par des oiseaux-raies. Ils sont en train de doubler le Cap des Aromates. À coup sûr, il s’agit de la caravane des épices ! Leurs cales doivent être remplies de toute sorte de choses rares que j’adore : muscade, encens, cannelle, girofle … et pigments pour la peinture. Peut-être auront-ils trouvé de la cocagne lors de ce voyage-ci ? À chaque fois que je les vois arriver, mon esprit s’emballe. […] Mais, pour l’heure, je dois réfléchir à ma situation. Trois jours de réclusion ! Et la dernière épreuve du concours qui a lieu d’ici à la fin de la semaine ! Ça ne me laissera que deux jours pour terminer mon tableau. C’est presque impossible !
Dans un Monastère perdu sur une petite île de l’archipel de la Sonde, sont formés des apprentis à la toute nouvelle magie des arts et de la peinture. Audas, jeune et impétueux elfe noir, suit ces cours avec assiduité, aidé de Lumière, sa raie des vents. Il se heurte rapidement à l’hostilité d’une des ses professeures, sœur Amilorine. D’où vient son aversion à son égard ? Est-ce simplement de la jalousie face aux facultés du jeune elfe ou bien est-ce la peur qu’Audas perce en premier les secrets de cette inquiétante magie ?
Les articles, interviews, et autres pages
Comment dédier une revue à la peinture et ne pas rendre hommage aux illustrateurs dont les couvertures nous font rêver ? Venez découvrir les inspirations, les travaux en cours et les réalisations de Michel Borderie, Marc Simonetti, Jean-Louis Thouard, Constantin Sunnerberg, Valérie Loetscher à travers quelques interviews exclusives.
Thomas Motti dédie son article « Du dessin et de l’imagination » aux passionnés de l’œuvre de Pierre Bottero, mise en image par Jean-Louis Thouard.
Et pour finir cette revue sur une note à la fois culturelle et de détente, pourquoi ne pas suivre les derniers méandres artistiques du petit monde du Val d’Ether à travers trois pages de missives ?
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Les contributeurs du numéro 2 : La Peinture « Ut pictura ars magica »
Auteurs : Rémi Przybylski, Andréa Deslacs, Tarik Kellou, Mike Barisan, Jérôme Simon, Galmier Falconis, Yann Valère
Illustrateurs : AkiSaé, A.D, Mike Barisan, Constantin Sunnerberg, Vay, Sabine Rogard
Articles : Amandine Thorrignac, Thomas Motti, Andréa Deslacs (Missives d’Etherval)
Interview : Valérie Loetscher, Constantin Sunnerberg, Michel Borderie, Marc Simonetti, Jean-Louis Thouard
Pages de détente : Andréa Deslacs, Jérôme Simon, Amandine Thorrignac, Edwige Atané.
Mise en page : Morrigan (PAO), Edwige Atané (correctrice)
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